Église Saint-Saturnin

Localisation :

Tours, 10-14 rue du Commerce

Dates :

VIe-XVIIIe siècle

État du batiment :

Détruit

Église Saint-Saturnin, détail de La fort ancienne et noble ville de Tours, Claes Jansz Visscher, 1625, gravure, Tours, Bibliothèque municipale, Ic. 2894/1-4. ©Crédits : © Bibliothèque municipale de Tours, cliché F. Joly

L’église Saint-Saturnin encore visible aujourd’hui dans le paysage urbain de Tours ne doit pas être confondue avec celle qu’il était possible d’admirer aux numéros 10 à 14 de l’actuelle rue du Commerce dont il ne subsiste rien. Saint-Saturnin est à l’origine une chapelle installée le long du Decumanus maximus, l’un des axes principaux traversant la ville d’est en ouest et qui correspond à la future Grand-Rue. Grégoire, évêque de Tours (573-594) décide d’y déposer les reliques de Saint-Saturnin, évêque de Toulouse martyrisé en 250. Ce n’est qu’en 1150 que la chapelle devient église paroissiale [Leveel, 1994, p. 70].

À la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, l’église et la paroisse Saint-Saturnin sont les espaces de dévotion des plus grandes familles tourangelles. La paroisse, située au centre de l’espace urbain, entre les deux anciens noyaux urbains, connaît une profonde réorganisation de son urbanisation avec l’implantation des grands hôtels des officiers qui accompagnent le roi en Val-de-Loire. Les De Beaune, les Bohier, ou encore les Morin et les Gardette, y construisent chapelles et mausolées. Certains vont même jusqu’à financer une partie de la construction de l’édifice, comme de Guillaume II Briçonnet, archevêque de Reims, qui fait élever une tour clocher majestueuse de style renaissance entre 1519 et 1521 [Martinière, 1911, p. 274]. D’après les vues de Tours sur lesquelles est représentée l’église Saint-Saturnin, la tour clocher s’élevait sur le flanc nord de l’édifice. Sa réalisation se rapproche de celle de la tour nord de la cathédrale Saint-Gatien, fruit du travail de Bastien et Martin François à qui l’on doit également attribuer la fontaine située sur la carroi de Beaune, à quelques mètres de Saint-Saturnin [Grandmaison, 1870, p. 201].

 

Église Saint-Saturnin, détail du Terrier sommier du fief de la châtellenie du corps ou chef de l’abbaye de Saint-Julien, Letourneux, 1761, Archives départementales d’Indre-et-Loire, H528.
Crédits : © Archives départementales d’Indre-et-Loire, H528

 

Les seules véritables descriptions que nous ayons de l’édifice datent du XVIIIe siècle [AD 37, Terrier de Saint-Julien, p. 420]. Selon un plan carré, l’église comportait trois nefs. Trois chapelles la longeaient sur le côté sud. L’une d’entre elles était la chapelle privative de la famille Bohier, dite de l’Ange-Gardien, une autre était celle réalisée par la famille de Beaune et dédiée à Notre-Dame-de-Pitié et enfin la dernière est dédiée à Sainte-Anne. Sur le côté opposé, au nord, s’élevait la tour-clocher. Le long des chapelles, s’étendait le cimetière avec la sacristie sur son flanc est.

Le martyre de saint Saturnin, André Polastron (d’après), v. 1527, tapisserie en laine et soie, 260 x 315 cm, Angers, Château d’Angers – ANG2005000033.
Crédits : © Bernard Renoux / Centre des monuments nationaux

L’église abritait de nombreuses œuvres d’art. Parmi les plus remarquables, on trouvait un important cycle de tapisseries relatant la vie de saint Saturnin [Giraudet, 1885, p. 146] offert par Jacques de Beaune en 1527 [Chazaud, 1994, p. 226]. Certaines des pièces qui composaient la tenture nous sont parvenues et sont conservées à Angers et Langeais [Giraudet, 1885, p. 147]. À ces tapisseries, il fallait ajouter des sculptures réalisées par certains des plus grands artistes tourangeaux pour les chapelles privatives de l’église. L’une d’entre elles est le Trépassement de la Vierge réalisée par Michel Colombe pour la chapelle de Beaune. Bas-relief en marbre et rehaussé d’or et d’azur, il représentait la mort de la Vierge et intégrait Jacques de Beaune et sa famille en prière [Chazaud, 1873, p. 364]. La chapelle Bohier abritait elle les statues de marbre du tombeau de Thomas Bohier et Catherine Briçonnet qui auraient été réalisées par Juste de Juste [Giraudet, 1885, p. 230].

L’église, peut-être en raison du prestige qui était le sien, a souffert de l’épisode des 100 jours de la domination des Huguenots en 1562 où plusieurs dégradations eurent lieu, des statues et des tombeaux furent ainsi mutilés [Leveel, 1994, p. 70]. Deux siècles plus tard, dans la nuit du 6 au 7 septembre 1772, la foudre s’abat sur le clocher et la voûte qu’elle endommage [Logeais, 1870, p. 39]. L’église est désacralisée en mai 1789 et serait devenue une maison particulière avant d’être mise en vente une première fois en 1792 comme bien national. Elle est finalement vendue à des démolisseurs le 2 février 1798 [Leveel, 1994, p. 70] et disparaît en 1805.

 

Bibliographie

Chazaud Guy du, « De quelques œuvres mobilières issues du milieu artistique tourangeau », dans Bulletin de la Société Archéologique de Touraine, Tome 54, p. 221-232.
« Compte-rendu de la séance du 28 juin 1871 », dans Bulletin de la Société Archéologique de Touraine. Tome II, Tours, Ladevèze, 1871-1872-1873.
Giraudet Eugène, Les artistes tourangeaux, architectes, armuriers, brodeurs, émailleurs, graveurs, orfèvres, peintres, sculpteurs, tapissiers de haute lisse, notes et documents inédits, Tours, Impr. de Rouillé-Ladevèze, 1885.
Grandmaison, Charles-Louis, Documents inédits pour servir à l’histoire des arts en Touraine, Paris, Dumoulin, 1870.
Leveel Pierre, La Touraine disparue et ses abords immédiats, Chambray, C. L. D., 1994.
Logeais M., Histoire des rues de Tours d’après un manuscrit de Logeais appartenant à la Bibliothèque publique […], augmentée d’un nouveau plan général de la ville depuis l’annexion de Saint-Étienne, Tours, Ed. J. Grassien, 1870.
Martinière Louis R., « La cloche de la tour de l’Horloge (ancienne cloche de Saint-Saturnin de Tours) », dans Bulletin de la Société Archéologique de Touraine, Tome 18, Tours, Péricat, 1911-1912, p. 273-285.


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